woensdag, april 30, 2014

Marie Collins, la voix des victimes de la pédophilie au Vatican

29/4/14

Le Croix 

Elle-même abusée par un prêtre, en 1960, alors qu’elle avait treize ans, Marie Collins est l’une des huit experts choisis par le pape François pour travailler au sein de la nouvelle Commission pontificale pour la protection des mineurs.

Cette commission se réunit au Vatican pour la première fois jeudi 1er mai.
Lorsqu’elle a appris qu’une Commission pontificale pour la protection de mineurs serait créée au Vatican, Marie Collins, qui fut l’une des premières en Irlande à dénoncer les abus sexuels commis par des prêtres, attendait comme un « test » de connaître les noms de ses membres. « J’espérais avant toute chose qu’elle inclue la voix des survivants. » Elle était pourtant loin d’imaginer qu’elle serait « appelée à incarner cette voix », raconte-t-elle, reconnaissant avoir éprouvé un « choc » à l’annonce de sa nomination parmi les huit experts de la nouvelle instance constituée par le pape François, le 21 mars.
Elle-même agressée sexuellement par un prêtre en 1960, devenue porte-parole des « survivants » de la pédophilie dans l’Église irlandaise, comme ils se dénomment eux-mêmes, cette Dublinoise de 67 ans affirmait avoir toujours gardé la foi, mais perdu « toute confiance » dans l’institution. Elle avait pourtant accepté, il y a deux ans, de participer au symposium international organisé au Vatican pour coordonner la lutte contre les abus sexuels dans l’Église, malgré les critiques de certaines victimes l’accusant de trahison.
Son témoignage avait alors bouleversé l’auditoire de cardinaux, évêques et religieux du monde entier. Marie Collins venait d’avoir 13 ans lorsque, hospitalisée pour une infection au bras à l’hôpital Notre-Dame, à Dublin, elle fut agressée sexuellement par l’aumônier, un prêtre de 26 ans, qui l’a aussi photographiée nue. Un calvaire qui devait durer trois semaines. « Ces visites du soir dans ma chambre ont changé ma vie. Tout en me molestant, il répétait qu’il “était un prêtre” et ne “pouvait pas agir mal” »,avait-elle confié.

« JE LUI AI PARDONNÉ »

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Marie Collins a tu son secret, rongée par la honte et la culpabilité, plongeant dans une dépression sévère. Son mariage et la naissance de son fils n’ont pas soulagé sa peine. Ce n’est qu’à l’âge de 40 ans qu’elle a osé s’ouvrir, pour la première fois, de cette agression. « J’ai pris rendez-vous avec un curé, qui a refusé de relever le nom de l’agresseur et m’a dit que c’était probablement de ma faute. Cette réponse m’a brisée. » Dix ans plus tard, alors que les scandales commençaient à être révélés par la presse, comprenant qu’elle n’était peut-être pas la seule victime, elle en a de nouveau parlé à son archevêque, qui a évoqué la « prescription » pour ne pas attenter à la « réputation » de l’aumônier. « Mon témoignage au Vatican m’a enfin permis d’exprimer combien ces abus et l’attitude, ensuite, de l’Église qui les a couverts m’avaient affectée. C’est l’histoire de nombreux survivants », dit-elle aujourd’hui.
Pendant près de trente ans, elle a tellement souffert psychologiquement qu’elle n’a pu mener de carrière professionnelle, ni même s’occuper de son fils comme elle l’aurait dû, en raison des séjours en hôpital psychiatrique. Sa renaissance, Marie Collins la situe au moment où son agresseur a comparu devant la justice. « Je l’ai rencontré une seule fois, à ce moment-là. Il m’a demandé pardon, je lui ai pardonné. Au nom de ma foi et parce que le pardon libère la victime tout autant que l’agresseur… »

UNE RELATION « TRÈS FRAGILE » À L’ÉGLISE

Apaisée, n’éprouvant, de son propre aveu, plus aucune colère, elle se bat à la tête de sa fondation et au sein de plusieurs associations pour la protection des enfants. Ces dernières années, les efforts déployés par la hiérarchie, en particulier Mgr Diarmuid Martin, archevêque de Dublin, ont peu à peu restauré sa confiance. « Sa contribution pour protéger les enfants dans le diocèse (NDLR : depuis 2003) a été cruciale, salue Mgr Martin. Ses conseils et ses commentaires critiques ont représenté une aide inestimable et m’ont inspiré personnellement. » Cependant, la relation de Marie Collins à l’institution ecclésiale est toujours « très fragile ». « J’ai quitté l’Église et suis revenue plus d’une fois au long de ces années. Le plus difficile était de bien distinguer dans mon esprit l’institution qui fermait les yeux et ma foi en Jésus-Christ pour garder l’espérance. »
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Marie Collins aborde cette nouvelle tâche « pleinement consciente de la responsabilité » qui l’attend : « C’est une occasion capitale pour faire connaître les préoccupations des survivants et nous assurer que l’Église catholique est une organisation sûre à laquelle les enfants peuvent participer sans peur d’être blessés », souligne-t-elle, se disant « déterminée » à « parler haut et fort ».« Je ressens une certaine frustration, l’Église est si lente. Les survivants ont entendu assez de demandes de pardon, ils veulent voir les choses changer… J’aimerais qu’ils ne soient plus considérés comme des adversaires devant les cours de justice. Il faudrait également que certaines Églises, en Afrique ou en Asie par exemple, qui pensent qu’elles ne sont pas touchées par ce problème, ouvrent les yeux et mettent en place des procédures. Si la commission n’apporte pas de changement réel, concret dans la manière dont l’Église protège les enfants, elle aura failli à sa mission. »

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